Titre : Freaks - La Monstrueuse Parade
Genre : Horreur
Titre original : Freaks
Année : 1932
Réalisateur : Tod Browning
Acteurs : Wallace Ford, Leila Hyams, Olga Baclanova, Roscoe Ates, Henry Victor, Harry Earles
Synopsis :
Au cirque Tetrallini, le lilliputien Hans est fasciné par la beauté de Cléopâtre l'acrobate et délaisse la minuscule écuyère Frieda sa fiancée. Il vient d'hériter, Cléopâtre décide de l'épouser puis de l'empoisonner avec l'aide d'Hercule son amant et complice. Au cours du banquet, Cléopâtre provoque et insulte les invités. Ayant la preuve de la tentative d'empoisonnement, les phénomènes décident de venger Hans et Frieda.
Dysmorphobie : peur des anomalies physiques, peut être la peur d’être laid et déformé.
Pour fêter Halloween la fête des morts dans les règles de l’art, je vous propose la critique d’un film, considéré comme l’un des plus choquants de l’histoire du cinéma, encore connu aujourd’hui pour sa thématique atypique, reprise de nombreuses fois dans la culture populaire. Une thématique connue du grand public grâce à la quatrième saison de la série horrifique American Horror Story Freak Show.
Freaks, la Monstrueuse Parade, est un film de Tod Browning, sorti en 1932, une époque trouble de l’histoire, où les foires aux monstres, ces célèbres Freak Show (voir le dossier Les Freaks Show de Lolaya) présentaient des gens au physique particulier. Des bossus, des amputés, des femmes à barbe, des microcéphales, des siamois, des nains, des géants, toute une panoplie de personnages en tout genre, présentés comme des animaux pour divertir le public. Ce film est au départ une adaptation du roman Spurs de Tod Robbins et Tod Browning, encore novice dans le cinéma parlant, en fit un film, aujourd’hui mondialement célèbre.
Popularisé en 2014 par American Horror Story, cette saison se sera beaucoup inspirée de Freaks, la Monstrueuse Parade. Que ce soit dans les personnages : la directrice du cirque, les sœurs siamoises, le duo de microcéphales, les nains, l’homme-tronc et l’homme fort, mais aussi dans des séquences particulières : la scène de vengeance des monstres sous la pluie, les scènes de repas sous le chapiteau, les différentes scènes du quotidien des monstres*.
Tod Browing dépeint alors le quotidien de ces êtres difformes qui, refusés par la société actuelle, vivent de leur travail de bête de foire, dans la joie d’avoir trouvé une véritable famille. Ce film fut un véritable scandale lors de sa sortie au cinéma, à dire vrai, les gens sortaient révoltés des salles de cinéma et ce, pour plus plusieurs raisons. Aujourd’hui, on pourrait voir ce film comme simple, avec une belle mentalité, une thématique encore peu expérimentée et un happy end justifié. Mais le pire a était que les acteurs de ce film sont de VÉRITABLES monstres, sans trucage ni maquillage. À l’époque, la mentalité collective était bien différente. Voir de véritables monstres* faire ce que des gens normaux feraient (fumer, manger, jouer, s’amuser, chanter, danser et vivre heureux), était révoltant.
Freaks, la Monstrueuse Parade devait permettre aux monstres* du monde entier de se faire accepter par la manière dont ils vivent au sein du cirque et par leur code d’honneur : vous attaquez l’un d’entre nous et c’est nous tous qui nous vengeons ! Voulant marquer le public avec un film d’épouvante novateur, il réussit sa mission haut la main, malgré le fait que ce film sera inscrit sur la liste noire de la MGM Productions pendant longtemps et qu’il provoquera un véritable scandale aux États-Unis dès les premières séances en janvier 1932. Les critiques étant abominables, Tod Browning ne s’en remettra jamais. Le film sera ensuite censuré dans de nombreux pays.
Le film dure 64 minutes, contre une version originale de 90 minutes, raccourcit de la sorte à cause de scènes jugées trop choquantes comme par exemple : les jambes de la méchante Cléopatra attaquées par la foudre, la transformant à son tour en monstre, ou alors la castration de l’homme fort Hercules.
Malgré cela, ce film réaffirme ce pourquoi on se bat encore aujourd’hui : l’égalité pour tous. On ressort de ce film avec une certaine mélancolie face à la vie difficile de ces marginaux. Tod Browning explore les tréfonds sombres de l’âme humaine, la cupidité des gens prêt à aller jusqu’au mensonge et au meurtre pour de l’argent,ou encore le refus des autres à accepter l’existence d’êtres anormaux. Mais la manière dont Tod Browning dépeint la vie de ces forains nous donne un espoir en l’avenir. On entre dans un moment de poésie où le temps s’est arrêté, où l’on ne cherche qu’une chose, la joie et le bien-être de sa famille.
On montre des monstres* avec des sentiments, sensibles face à la cruauté de la méchante Cléopatra et de Hercules, prêt à défendre leur famille et réclamer vengeance. Freaks, la Monstrueuse Parade présente donc ces monstres* de foire que les gens avaient l’habitude de voir comme des objets de divertissement, avec des sentiments et une personnalité. En gros, ce sont des gens normaux à part entière, une chose hallucinante et apparemment révoltante à l’époque. La belle Cléopatra est l’exemple type de l’être normale qui se sent au-dessus des monstres* et dès lors où ceux-ci veulent l’accepter dans leur famille de monstres*, elle se révèle méchante et annonce tout de suite qu’elle n’est pas comme eux et qu’elle ne veut pas l’être.
« Nous ne vous avons pas menti, nous vous avions annoncé des monstres, et vous avez vu des monstres. Ils vous ont fait rire et trembler… Pourtant, si le hasard l’avait voulu, vous pourriez être l’un d’eux. Ils n’ont pas demandé à naître, mais ils sont nés, ils vivent. Ils ont leurs codes, leurs lois. Offenser l’un d’entre eux, c’est les offenser tous… ».– Épilogue du film
La cruauté et la méchanceté à l’état pur sont montrées sans édulcorants et avec beaucoup de réalisme. On comprend donc que Tod Browning veut montrer que la nature humaine a une part de cruauté que l’on ne peut cacher. L’intolérance, la bêtise, l’ironie du sort, la perversité et tout simplement le mal sont présentés dans une atmosphère très pesante. Le paradoxe entre la beauté de l’âme des monstres et la mocheté de l’âme des gens normaux est le point majeur du film, lui donnant un sens philosophique. C’est une fable effrayante que nous offre Browning, qui nous subjugue, qui nous pousse a allez voir au-delà du bout de notre nez. Que dessous l’apparence physique peut se cacher une personnalité totalement différente : la belle méchante et le gentil laid.
Ces étranges personnages sont pourtant comme nous et, au vu du scandale que ce film a provoqué lors de sa sortie, les gens n’étaient pas tout à fait d’accord avec ça. Comme le dit si bien l’annonce du prologue : “Jamais plus une telle histoire ne pourra être filmée”. Même si la saison 4 d’American Horror Story fut excellente, elle n’aura pas eu le même déclic que son prédécesseur et ce, car la saison 4 est sortie en 2014 et 2015, une époque nouvelle où la différence se fait de plus en plus accepter (exemple probant : le mariage pour tous).
Freaks, la Monstrueuse Parade m’a charmé, m’a envoûté, m’a appris l’empathie depuis que je l’ai vu il y a 5 ans. Il m’a fallu le regarder une vingtaine de fois pour le comprendre sous tous ses angles et en faire une critique. Je vous incite à tous de le regarder, de découvrir cette belle leçon d’humilité. Testez votre seuil de tolérance et je n’ai qu’une chose à dire : si vous avez un problème contre le message de ce film, c’est vous qui avez un problème !
Apprenez l’empathie à votre tour, découvrez la beauté de l’âme et son alter ego vicieux. Et pour tous les fans de la série American Horror Story (comme moi), regardez-le pour comprendre un peu plus le but de Jessica Lange et Ryan Murphy lors de la réalisation de cette quatrième saison ! Pour finir, n’oubliez jamais :
Ma note : 100 sur 5 !!!
*Terme à prendre au premier degré, je prends ce mot, très utilisés à l’époque et n’a pas vocation d’insulter ou critiquer !
Note de Charlie
La Bande Annonce :